5 avril 2017

Train de pluie – 2015

 

 

Informations

 

Écrit : par le collectif TRAVERSE, Julie Ménard, Adrien Cornaggia, Kevin Keiss, Yann Verburgh

Lieu : La Scène du Canal, 116 quai de Jemmapes 75010

Mise en scène : Catherine Hubeau et Marie-Laure Speri

Conseiller artistique : Eric Louviot

Scénographie : Michaël Horchman

 

Résumé

 

Une femme raconte à un homme comment les gens, par centaines, avant de prendre le train, lui confiaient leurs affaires. Ces gens ne sont jamais revenus, mais elle est restée, avec toutes ces choses dont elle ne sait que faire, elle a tout recueilli chez elle dans sa maison transformée en musée. L’homme, lui, était dans un wagon qui les emmenait vers les camps. Il y a rencontré un père et son fils de 12 ans ; il dit l’extraordinaire volonté chez ce père de profiter de chaque instant pour transmettre à son fils l’essentiel de ce qui saurait faire de lui un homme.

Le spectacle est une partition croisée pour une femme qui attend qu’on vienne chercher ce qu’on lui a confié, un homme qui revient chercher ce qu’il a laissé, et un violon qui déroule sur les rails désormais inutiles la longue mélodie des héros oubliés.

Les deux personnages se rencontrent, se parlent, cherchent à savoir où ils en sont, dans une interrogation sur eux-mêmes et sur la vie. La rencontre, poignante, ne fait pas disparaître l’humour, omniprésent dans le texte de Segal. La femme qui au début pose la question de l’oubli va sans doute trouver la force de regarder la vérité en face.
Ces textes n’éludent pas la réalité dans toute sa noirceur, le pire de la nature humaine mais aussi le sublime; ils parlent de la mémoire mais aussi de l’espoir.

 

Note d’intention

 

C’est une parole à deux voix. L’une dont le corps, engourdi dans l’attente, s’exprime par le jaillissement et le
redoublement des mots, nous livre, avec l’innocence de la jeune fille d’alors, et la douleur d’une vie de silence que nul n’est venu partager, l’histoire qu’elle s’est forgée et dans laquelle elle s’est enfermée. L’autre multiplie la dépense du corps. Il est question de débordement et d’urgence.

L’homme fait revivre avec humour et dérision ce temps du voyage, rythmé par le bruit obsédant des rails, ce temps compté, où faire le clown et le pitre, c’est faire un pied de nez à la mort. L’idée est de jouer la situation dans l’exagération même, peut-être, car pour lui comme pour elle, il faut maintenant se livrer, se débarrasser du fardeau du passé. Une double catharsis en quelque sorte.

Le violon évoque la mémoire, donnant un contrepoint rythmique aux paroles des acteurs. Le violoniste est pris à témoin et l’homme l’investit d’un rôle en s’adressant à lui à certains moments. Le musicien fait le lien entre les deux fragments d’une histoire qui au fond se complètent. Les musiques sont de Messiaen, Bach, Isaïe, Chostakovitch, Arvo Pärt; nous faisons aussi appel à la musique Klezmer.

Incisé par une diagonale de voie ferrée qui semble s’enfoncer dans le sol, l’espace délimite deux zones vides appropriées pour chacun des temps convoqués. Que ce soit l’avant-scène pour le présent ou le plan lointain pour faire revivre le passé. La seule concession faite aux objets dont la femme est la gardienne, est une avancée
de ceux-ci empiétant sur le bord du plateau.

Le travail de lumière sculpte l’espace, détermine le temps et la durée de la rencontre, creuse les vagues du sol et irise les rails qui peuvent devenir incandescents comme deux voies parallèles jusqu’à l’éblouissement. Le blanc pur
est privilégié. Seules les qualités des sources employées font jouer les contrastes.

 

 


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